À Haution au nord de l’Aise, un impressionnant camaïeu de plantes aromatiques pousse et se retrouve dans des infusions bio.

Lorsqu’on la frotte entre ses doigts, l’agastache dégage un puissant parfum anisé qui nous téléporte à l’autre bout du monde. Pourtant, cette fleur violacée originaire d’Alberta au Canada pousse bien sous nos latitudes. « C’est la magie des plantes aromatiques, sourit Emmanuelle Roy. Elles font voyager juste en froissant les capsules d’huiles essentielles dissimulées sous leurs feuilles. » Un peu comme quand on éclate du papier-bulle. Car nous ne sommes pas en Amérique du Nord mais à Haution, gentillet village de Thiérache. Précisément au beau milieu du Jardin Roy dont les mille et une vertus se concentrent en infusion.

Terre et accords fertiles

En ce début de printemps, les lignes de valériane et de thym-citron montrent des signes de vigueur. Entre mars et septembre, dans cet Eden fertile où les intrants sont bannis, « le paysage évolue chaque jour », assure Emmanuelle Roy. Et ce, depuis vingt ans qu’elle et son mari Philippe y ont élu domicile pour créer une aire bucolique où s’entrelacent les senteurs enivrantes de dizaines de plantes aromatiques. « Nos infusions reflètent cette diversité et l’essentiel du métier consiste à équilibrer les arômes », souligne Philippe. Veiller à ce que la menthe poivrée n’écrase pas la marjolaine, s’assurer que le calendula n’agresse pas les feuilles de bouleau, trouver une place à l’armoise absinthe, la petite dernière « qui déménage ». Ce travail d’équilibriste nécessite des heures de test et pas mal d’interrogations. « Quand je conçois une infusion, je me pose quatre questions : est-ce que je suis en mesure de pérenniser la culture ? Quel en est l’intérêt ? Est-ce que c’est bon à consommer ? Et surtout est-ce que le mélange sera beau ? », souligne Emmanuelle.

Comprendre, c’est aimer

Ancienne professeure des écoles, Emmanuelle Roy met un point d’honneur à expliquer sa passion. Pour aider les néophytes que nous sommes à voir à quoi ressemblent des fleurs de monarde, un bouquet d’achillée millefeuille ou une tête d’orcanette, elle a réalisé un livre de photos agrémentées de commentaires bien sentis. Dans un futur proche, l’agricultrice entend compléter son discours de visites scolaires pédagogiques. Les enfants pourront admirer les semis de bleuets qui attendent sous serre, découvrir le géranium rosé de l’île de la Réunion et, avec un peu de chance, coiffer leur index d’une framboise qu’ils dévoreront à l’ombre du verger. Car au Jardin Roy, on transforme aussi les fruits – pomme, rhubarbe, cassis, groseille… – en sirops et autres confitures. Pour emporter chez nous un autre échantillon de paradis.

Pesto et savons

Vous avez déjà goûté le pesto à l’ail des ours d’Emmanuelle et Philippe Roy ? Il est divin. La récolte a lieu de mi-mars à mi-avril. Fanée sur claies, lavée, ciselée grossièrement, cette plante des sous-bois est mise en pot avec un mélange d’huile d’olive, de vinaigre, de sel et de citron. Dans un autre registre, le Jardin Roy va prochainement proposer une gamme de savons bio à base, entre autres, de lavande, de mauve, de calendula et de pâquerette en provenance directe du jardin.

Le Jardin Roy

1, rue des Ecoles
02 140 Haution
Tél. : 03 23 98 30 69
06 77 52 74 79

www.lejardinroy.fr

Texte Joffrey Levalleux, extrait du magazine « Parlons saisons » n°21

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