L'avocat de l'avocette
Trois coups de lame de sa robuste main gauche. « C'est la signature du boulanger. On la réalise juste avant d'enfourner à 260° dans le four à sole », explique Marino Cavallo. Le geste est sûr malgré la fatigue. Debout depuis 23h30, soit depuis onze heures sans interruption, l'artisan de Saint-Valéry-sur-Somme enchaîne pétrissages et pâtons. Mais que ne ferait-il pas pour nous faire goûter une Avocette ? Vingt-deux minutes plus tard, c'est la consécration au Fournil de Paul. « Elles ne sont pas craquantes ?
Avant de poursuivre son plaidoyer, regardez les deux extrémités sont légèrement galbées. Comme le bec de l'oiseau du même non. » Un quart d'heure en compagnie de Marino et vous savez pourquoi les vingt ans de cette baguette 100% samarienne est un petit événement dans le paysage culinaire régionale. Créé en 2004 (cf encadré), l'Avocette est la proche cousine de la célèbre baguette de tradition française. La différence tient à la provenance du blé tendre - 30 km autour de la Baie de Somme pour l'Avocette, le département pour la Tradition - et aussi à sa mie très alvéolée et un peu élastique. Mais la farine vient du même endroit.
Au four mais aussi au moulin
À quelques battements d'ailes dans le village de Cahon-Gouy abreuvé par la rivière Trie, les Moulins Riquier sont en effervescence depuis... 1670 ! Soit à la louche 350 ans. Héritier d'une lignée sans fin, Antoine Riquier incarne la 12e génération de meuniers. Une génération pour qui la traçabilité est primordiale. « Pour la farine qui sert à l'Avocette, on utilise du blé tendre qui vient de Cahon, de Cambron, de Mannay et de Vismes-au-Val », précise notre guide qui n'a pas hésité à floquer sa flotte de véhicules du dessin de cet oiseau rare.
Pourtant, l'Avocette ne pèse que 10 % du volume de farine écrasée chaque année. Soit 100 tonnes. Mais comme le rappelle Antoine, « cette baguette est devenue une sorte d'étendard local », au même titre que le gâteau battu ou l'agneau des prés-salés de la Baie de Somme. Au moment où s'écrivent ces lignes, le blé tendre commence son doux réveil. Semé à la fin de l'automne, il est récolté au plus fort de l'été, fin juillet/début août.« Son principal ennemi, c'est le surplus d'eau », note Antoine Riquier. C'est peut-être là la seule différence avec l'oiseau migrateur. Qui lui, apprécie les zones humides.
Texte : Joffrey Levalleux



L'âme de la filière
Créer de la valeur ajoutée à la filière blé-farine-pain. Tel était le souhait de la Chambre d'Agriculture de la Somme. Nous sommes en 2004. Après des semaines d'échanges, une poignée de boulangers et un meunier (Antoine et Philippe Riquier) donnent naissance à la baguette Avocette. Référence à l'emblématique oiseau migrateur qui est aussi la mascotte du parc du Marquenterre.
Pour réaliser cette baguette, deux impératifs doivent être respectés à la lettre : le goût et la couleur. Et c'est la poolish (pré-fermentation à base de farine, d'eau et de levure) qui détermine les deux. Encore aujourd'hui, la farine provient donc de blés tendres issus de l'exploitation Riquier mais aussi de deux coopératives respectueuses de l'environnement (Calipso et Noriap).
Retrouvez la liste des artisans boulangers
qui travaillent l'Avocette sur :
www.moulinsriquier.com
Rubrique "Nos produits"